LA REVUE PRESCRIRE ET L'HOMEOPATHIE PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Philippe Colin   
Dimanche, 06 Janvier 2013 17:57


 

Régulièrement, les abonnés (dont je fais partie) à la revue Prescrire ont l’occasion de lire des articles hostiles à l’homéopathie.

Les deux derniers numéros présentent tous les deux un article parlant de notre discipline.

Le numéro 349 (novembre 2012 page 869), renferme un billet sur les médecins prescripteurs d’homéopathie et leurs patients, intitulé « Homéodépendance ?» : le médicament homéopathique serait le viatique permettant de faire l’impasse sur l’écoute active du patient, une éventuelle psychothérapie ; il serait LA réponse à tous les petits et grands maux de l’âme.

L’auteur de cet article montre une méconnaissance complète de la pratique de la médecine homéopathique. Certes, l’attitude qu’il dénonce peut parfois se rencontrer, mais elle est beaucoup moins fréquente que cet auteur le laisse croire. Pratiquant la médecine homéopathique depuis plus de trente ans, je peux témoigner que de nombreux confrères homéopathes n’ont pas du tout cette pratique. Qui plus est, rencontrant dans mon activité plus de 50% de motifs de consultation pour raison psychologique, je peux assurer que le médicament homéopathique, dans de telles pathologies, n’a pas la fonction que cet auteur dénonce. Cela permet  tout d’abord d’éviter de prescrire benzodiazépines et antidépresseurs. Comme le médicament homéopathique ne met pas d’étouffoir à l’expression du patient, il favorise la relation médecin malade, et n’empêche pas, bien au contraire, le développement d’un soutien psychothérapique. Mais oui, cher confrère, les médecins homéopathes pratiquent eux aussi le dialogue, le partage de décision, l’écoute active, l’éducation thérapeutique, et cetera… Et les patients se soignant par homéopathie ne sont pas les derniers à se prendre en charge pour leur pathologie, et pas uniquement avec leurs granules, mais aussi avec d’autres méthodes, en particulier l’hygiène de vie et l’alimentation. Et nombre d’entre eux ne rechignent pas à entreprendre une psychothérapie quand ils en ont besoin.

Le numéro 350 (décembre 2012) comporte un article intitulé « Freiner la montée laiteuse sans médicament », pages 918-920.

L’homéopathie y est citée en faisant référence à un article paru sur la question (Berrebi A et coll. « Traitement de la douleur de la montée laiteuse non souhaitée par homéopathie dans le post-partum immédiat » J Gynecol Obstét Biol Reprod 2001 ; 30 (4) : 353-357. Il s’agit d’un essai randomisé en double aveugle contre placebo chez 71 femmes ne souhaitant pas allaiter, en complément d’un traitement antiinflammatoire par naproxène. La douleur a été évaluée tous les jours pendant 4 jours ; les différences à J2 et J4 ont été considérées comme statistiquement significatives. L’article ne mentionnant pas les évaluations à J1 et J3, la rédaction de Prescrire en conclue que ces jours-là, les scores de douleur étaient, soit défavorables à l’homéopathie, soit non différents du placebo. Et d’en conclure que l’efficacité e l’homéopathie n’a pas été démontrée dans cette situation. Si l’on peut effectivement regretter que les évaluations à J1 et J3 n’aient pas été publiées, la mauvaise foi de la rédaction de Prescrire paraît toutefois évidente : une amélioration à J2 et J4 ne peut être qu’accompagnée d’une amélioration à J3, les résultats selon une courbe sinusoïdale dans cette situation clinique ne sont pas plausibles. L’absence éventuelle de réaction positive à J1 de toutes façons ne veut rien dire quant à une hypothétique absence d’action du traitement homéopathique, tout au plus un retard d’action…

Les critiques relatives aux traitements homéopathiques contenues dans cette revue témoignent seulement de ce qu’il ne faut pas faire. Pas un seul médecin homéopathe ne refuse la contradiction dans la mesure où celle-ci témoigne d’une volonté de dialogue. Le travail sur le mode d’action de l’homéopathie n’est pas terminé, loin s’en faut. L’approfondissement et la vérification de la Matière Médicale est absolument nécessaire. Le socle sur lequel repose l’homéopathie manque de bases solides, c’est vrai, mais de grâce, ne jetons le bébé avec l’eau du bain !

Docteur Philippe Colin