Matière Médicale de Bovista PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Philippe Colin   
Jeudi, 08 Mars 2012 07:16

BOVISTA

 

A une époque où les souches toxiques ou allergisantes subissent à tort les foudres de nos autorités de tutelle, il a paru utile de présenter ce « petit » remède, issu d’une souche non toxique : il s’agit en effet d’un petit champignon, la vesse de loup, comestible quand il est jeune, quoique sans grande valeur gustative (à quand la pathogénésie d’une girolle ou d’un homard ? nos cousins d’outre-atlantique viennent de sortir la pathogénésie du saumon…)

 

Plus sérieusement, l’étude attentive de la matière médicale de ce remède se révèle être très intéressante, et il ne fait aucun doute que son utilisation devrait être plus importante, du moins dans ma pratique quotidienne.

 

Bovista a été peu expérimenté, comme nous l’apprend TF Allen dans son Encyclopédie, seulement cinq expérimentations, dont deux observations effectuées, l’une après avoir inhalé la fumée d’un champignon en train de brûler, l’autre après avoir respiré la teinture de ce champignon. C’est dire que, une fois de plus, d’autres expérimentations seraient nécessaires pour confirmer et développer la matière médicale de cette souche.

 

La matière médicale présentée ici est une traduction de l’Encyclopédie de TF Allen avec des ajouts des matières médicales de Clarke, de Hering et de Vermeulen.

 

Psychisme

Deux ordres de symptômes sont présents, un stade d’excitation et un stade de décompensation.

On peut noter d’abord une agitation, un anxiété ; Bovista est hypersensible, prend tout de travers, est querelleur. Il est bavard, parle de ses troubles facilement, est de bonne humeur le matin et maussade le soir ; il est courageux et vigoureux. Il peut exister une alternance de rires et de pleurs (Clarke).

Bovista pourra  être aussi distrait, a du mal à fixer son attention, présente une lenteur intellectuelle, est maladroit, laisse tomber les objets qu’il tient entre les mains ; tout ceci pourra évoluer vers un état dépressif aggravé par la solitude et nettement amélioré en compagnie.

L’enfant peut bégayer (Hering). Ce bégaiement est retrouvé dans Allen à la rubrique bouche, mais n’est pas spécifique de l’enfant pour cet auteur.

 

Tête

Il existe une confusion et des vertiges, avec tendance à tomber en avant ou en arrière, aggravés en se levant (+), des pertes de connaissance avant ou après les céphalées (+).

On peut constater une lourdeur, des céphalées aggravées en se couchant et après une sieste ; le type de douleur est variable, parfois insupportable, comme une suppuration, ou pulsatile, constrictive, ou encore à type de meurtrissure, d’agrandissement, ou de compression par un bandage serré ; la douleur pulsatile est soulagée par l’apparition de transpiration au niveau de la tête.

Les douleurs frontales et temporales sont peu caractéristiques, les douleurs pariétales peuvent survenir en rentrant de l’air froid dans une pièce chaude, les douleurs occipitales peuvent irradier au dessus de l’œil gauche et être aggravées en  rentrant dans une pièce chaude.

Le cuir chevelu est très sensible au toucher, ne supporte pas le peigne ; il existe un prurit de tout le cuir chevelu, aggravé à la chaleur et non soulagé en se grattant (+), et des éruptions maculaires ou vésiculaires très prurigineuses.

La valorisation du symptôme « sensation de tête augmentée de volume » est due à Hering. Ce symptôme, que l’on retrouve valorisé dans toutes les matières médicales, est rattaché par Clarke à la doctrine des signatures (ce champignon évolue en effet en gonflant de façon importante par rapport à sa taille initiale).

 

Yeux

Il existe des signes de conjonctivite purulente ou non, des douleurs oculaires pouvant être aggravées pendant les règles ; des troubles visuels peuvent survenir : sensation d’un voiles devant les yeux, comme si des ciseaux allaient être piqués dans ses yeux par une personne étant assis à deux pas, ou comme des ciseaux étaient fermés devant ses yeux.

 

Oreilles

Les douleurs sont peu caractéristiques ; une otorrhée durant depuis quatre ans disparut pendant une expérimentation ; une surdité peut apparaître, associée à des erreurs en agissant ou en parlant. Il existe un prurit soulagé en mettant le doigt dans le conduit auditif (modalité ajoutée par Hering), et des croûtes épaisses suintantes (Hering).

 

 

Nez

Le nez est bouché, le patient est obligé de se moucher fréquemment, la rhinorrhée peut être muqueuse, ou purulente, ou croûteuse ; les éternuements sont fréquents, des épistaxis (+) peuvent survenir, soit spontanément, soit en éternuant, soit en enlevant les croûtes. Il existe une très grande sensibilité aux courants d’air (Hering).

Le nez semble enflé, la peau semble trop serrée ; il existe une rougeur entre le nez et la lèvre  supérieure.

 

Visage

La face est très pâle (+), ou parfois rouge, parfois pâle. Les lèvres peuvent être crevassées ; les malaires présentent des douleurs térébrantes, les lèvres inférieures sont douloureuses, comme si elles étaient coupées, ou comme si elles étaient piquées par des échardes ou par des aiguilles ; la lèvre supérieure est oedématiée ; la mâchoire gauche est douloureuse ; une glande sous-maxillaire semble être enflée.

Les muscles de la face présentent des mouvements convulsifs, avant une crise d’asthme (ajout de Hering).

 

Bouche

Les dents sont douloureuses, avec des saignements (+), ou parfois des ulcérations au niveau des gencives, qui sont enflées et douloureuses.

La langue peut être jaune, présenter des douleurs coupantes (+), et un petit ulcère sur son bord.

La bouche est sèche, comme si elle était remplie de sable, avec soif, ou bien brûlante, sans soif. Il existe une mauvaise haleine, et parfois une sialorrhée (+).

Bégaiement, surtout en lisant, avec incapacité à prononcer plusieurs mots rapidement (Hering).

 

Gorge

La gorge est sèche, avec une langue qui semble être faite en bois ; cette gorge est douloureuse, le patient a besoin de la racler fréquemment la nuit ou le matin, pour décrocher un peu de mucus. L’irritation peut entraîner une toux surtout l’après-midi.

Il existe des adénopathies cervicales douloureuses.

 

Estomac

Appétit augmenté ou anorexie, soif augmentée ou absente.

Désir de pain avec aversion de nourriture cuisinée ; désir de brandy, de vin, de lait. Aggravation par les liqueurs, le vin, la nourriture froide, amélioration par les aliments chauds (modalités alimentaires ajoutées par Hering).

Eructations (+), hoquet, nausées.

Aérophagie, sensation de brûlure ou d’avoir un morceau de glace dans l’estomac.

Intolérance aux vêtements serrés à la taille (Hering).

 

Abdomen

Douleurs piquantes dans l’hypochondre droit ou gauche.

Douleurs brûlantes ou piquantes autour de l’ombilic, ou douleurs péri-ombilicales comme si des couteaux coupaient l’abdomen.

Ballonnement, abondance de gaz, sensations de froid, de brûlure, douleurs spasmodiques obligeant à se plier en deux, douleurs piquantes ou coupantes, pouvant être soulagées par l’évacuation de gaz ou de selles, parfois améliorées en mangeant, à la différence de colocynthis, souligne Hering.

Douleurs de l’aine droite, parfois améliorées en s’étirant. Douleurs de la fosse iliaque gauche irradiant à la fosse iliaque droite.

Douleurs rectales brûlantes ou piquantes, envies pressantes d’aller à la selle, prurit anal.

Diarrhée avec parfois douleurs abdominales, pouvant être aggravées avant et pendant les règles (++). Selles molles ou constipation.

Prurit important du coccys qui oblige à se gratter et mettre la peau à vif (+).

Ictère néo-natal (ajout de Hering).

 

Appareil urinaire

Douleurs dans la région des reins ; douleurs uréthrales pendant et/ou après la miction, ou encore sans uriner ; mictions fréquentes avec urines augmentées de volume ; urines troubles de couleur jaune clair ou verdâtre, laissant parfois un sédiment violet.

Diabète sucré (valorisé par Hering). Ecoulement uréthral (Hering).

 

Appareil génital

Masculin

Nodule inflammatoire et douloureux sur la peau du pénis, qui suppure au bout de 14 jours.

Rêves érotiques.

Plaintes après excès sexuels (Hering).

Féminin

Sensation voluptueuse au niveau des organes génitaux.

Douleur du mont de Vénus pendant les règles.

Leucorrhée comme du blanc d’œuf, aggravée en marchant (+) ; leucorrhée purulente.

Règles le plus souvent en avance et plus abondantes, parfois en retard et peu abondante, non douloureuses.

Douleurs génitales accompagnées d’une importante lourdeur lombaire, quelque peu soulagée par l’apparition de règles (+).

Les règles coulent davantage le matin, et sont peu abondantes pendant la journée et pendant la nuit (+).

Les règles sont moins longues que d’habitude et coulent surtout la nuit.

Traces de sang entre les règles (9ème, 10ème, 13ème et 18ème jour) (+).

Kyste ovarien (Hering).

 

Appareil respiratoire

Larynx

Besoin important de racler le larynx pour détacher un mucus collant et de goût salé qui menace d’étouffer.

Irritation laryngée qui fait tousser.

Enrouement le matin.

Toux

Toux sèche par irritation dans le larynx, la trachée ou le thorax, le matin et le soir.

Toux spasmodique avec dyspnée ; respiration profonde et angoissée ; la patiente appelle à l’aide d’une voix faible, et est très améliorée en ouvrant la fenêtre et en respirant de l’air frais.

Toux sèche le matin et grasse le soir (Hering).

Respiration

Respiration profonde et bruyante ; respiration angoissée ; oppression respiratoire ; respiration courte à chaque mouvement des mains.

Besoin de desserrer les vêtements (Hering).

Rires et pleurs spasmodiques, avec asthme (Hering).

Thorax

Nombreuses douleurs thoraciques ; sensation de brûlure, de compression, de striction, de piqûres.

 

Cœur

Anxiété dans la région précordiale.

Pression dans la région précordiale, avec tension dans les tempes et pression sur le sternum.

Palpitations, avec vertiges et céphalées, ou avec tremblements généralisée et malaise.

Palpitations avec congestion de la tête, soif, sensation de chaleur et prurit de l’œil droit.

Palpitations avec tremblements des mains, vertiges, agitation, céphalées, et règles abondantes (Hering).

Palpitations avec sensation comme si le cœur travaillait dans l’eau, après surmenage physique (Hering).

 

Cou et dos

Raideur de la nuque, le matin au lever. Tension douloureuse du côté droit du cou au mouvement de la tête, et secousses dans l’oreille gauche. Tension et douleur à la pression du cou à la pression, comme par un coup.

Douleurs piquantes de la nuque, pendant le repos et le mouvement, le soir ; douleurs piquantes aigues du côté gauche du cou, irradiant dans l’oreille gauche ; douleurs déchirantes dans les tendons du côté gauche du cou.

Douleurs piquante et déchirante du bord interne de l’omoplate droite, avec la sensation comme si un morceau allait être arraché, en se penchant, disparaissant en se redressant.

Quelques violentes piqûres comme par un couteau, entre les épaules, l’après-midi.

Douleurs piquantes dans la région lombaires, en tournant le corps.

 

Extrémités en général

Grande lassitude dans les mains et les jambes toute la journée (+).

Membres supérieurs

Diminution de la force dans les épaules ou dans les bras.

Douleurs du bras gauche empêchant presque tout mouvement, augmentant dans la journée, diminuant le lendemain matin après avoir transpiré.

Douleurs du bras droit au toucher avec sensation de pression dans les épaules.

Douleurs des épaules, sensation d’épaules trop courtes, douleurs du côté interne de l’omoplate gauche, ou de l’épaule droite.

Douleurs humérales soulagées par la pression, ou du bord interne du bras gauche, violente comme s’il allait se casser.

Douleurs des coudes, des poignets ; tiraillements spasmodiques des tendons des poignets ou sensations d’engourdissement du poignet gauche.

Manque de force dans les mains, tendance à laisser tomber les objets, même les plus légers (+).

La main est raide, elle est difficile à fermer, et les doigts semblent faibles.

Douleurs piquantes de l’index droit, ou violent déchirement du pouce gauche.

Hygroma sur la main (Hering).

Membres inférieurs

Douleur intermittente de la hanche droite en se penchant, comme si le sacrum était fracturé.

Douleurs comme par des piqûres de mouches sur les hanches et l’abdomen.

Douleurs du genou gauche à l’extension, après qu’il ait été plié quelque temps ; douleurs du genou gauche en se levant de la position assise.

Douleurs osseuses violentes de la face interne du genou droit, ou sensation de rotule fracturée.

Sensations d’endormissement de la jambe droite ; mêmes sensations d’endormissement au niveau de la jambe gauche, avec sensation comme si des fourmis couraient sur la peau, si bien que la patiente ne pouvait pas se tenir debout sur cette jambe.

Douleurs de la partie inférieure de la jambe droite pendant les règles.

Crampes dans les mollets.

Douleurs piquantes dans le milieu du tibia gauche, ou dans la malléole externe de la cheville droite (+), avec endolorissement de la malléole interne.

Douleurs déchirantes et tiraillantes dans un pied qui avait été foulé dans l’enfance, avec œdème du pied, comme si l’articulation avait été fracturée, avec œdème du pied si bien qu’elle ne pouvait pas se chausser.

Œdème de la cheville persistant des années après une entorse (Hering).

Douleur de l’avant-pied en marchant, pendant plusieurs jours.

Brûlure de la plante du pied gauche.

Douleurs piquantes des gros orteils, irradiant aux chevilles, le soir.

Douleurs des cors.

 

Signes généraux

S’étire fréquemment, sans somnolence.

Très maladroit, tout tombe de ses mains (+).

Epuisement important, perte de force subite, si bien qu’elle ne peut pas tenir sa tête.

Chute en essayant de marcher, avec raideur des membres et du tronc ; bien que tout soit fait pour la remonter, elle tomba de nouveau et restait sans mouvements ; elle était désespérée.

Alternance de chaleur et de froid dans tout le corps, avec anxiété.

Anxiété diffuse et faiblesse générale, avec fréquents bâillements, besoin de s’étirer et envie irrésistible de dormir.

Sensation de meurtrissure de tout le corps, en particulier dans les articulations de bras et dans les muscles abdominaux, au mouvement et au toucher.

 

Peau

La peau des doigts devient inhabituellement coupée par les instruments avec lesquels elle travaille, couteaux ou ciseaux (++).

Chair de poule sur tout le corps avec démangeaisons sévères.

Fissures des commissures des lèvres (+).

Eruptions (macules ou papules) en des endroits divers du corps, accompagnées le plus souvent de démangeaisons importantes, aggravées en se grattant (nombreux symptômes dans Allen).

Petites vésicules au coin de la bouche ; ampoules sur la main droite, qui disparaissent au bout d’une demi-heure ; ampoules sur le dos des deux pieds et à la racine des orteils.

Eruption purulente sur le coin gauche de la bouche, sur le menton, et sur le front.

Une verrue qui existait auparavant se mit à suppurer et disparut, au bout de 21 jours.

Deux grandes pustules sous le nez, suivies d’une croûte qui subsista pendant plus de 15 jours.

Démangeaisons parfois sévères, localisées ou généralisées, avec ou sans éruptions, le plus souvent non soulagées en se grattant.

Transpiration sur la poitrine, ou transpiration sous les bras (avec odeur d’oignon, pour Hering) en marchant lentement au froid.

 

Sommeil et rêves

Somnolence

Bâillements fréquents, le matin, ou l’après-midi avec somnolence.

Somnolence importante, tôt dans la soirée (+).

Sommeil après le repas, contrairement à ses habitudes.

Somnolence pendant le dîner ; importante somnolence après dîner.

Insomnie

Sommeil raccourci.

Insomnie avec agitation importante, peut se réveiller toutes les heures.

Quand il se réveille la nuit d’un sommeil très profond, il ne semble pas reconnaître où il est.

Rêves

Sommeil plein de rêves.

Rêves d’évènements futurs et anciens.

Nombreux rêves d’une conversation passée, dans un sommeil profond.

Rêves angoissants de serpents qui la mordent, qu’elle va mourir, qu’elle a une blessure qui saigne, et cetera. Là-dessus, elle se réveille et reste angoissée un long moment.

Rêves de vexations et réveils fréquents la nuit.

Rêves effrayants, qu’elle était dans une cave et que les murs s’écroulent sur elle, qu’elle ne pouvait plus sortir.

Rêves de danger de noyade et que quelqu’un était tombé dans l’eau.

Rêves de fantômes.

Ne se souvient pas de ses rêves.

 

En conclusion

Bovista semble avoir un intérêt en pratique dans de nombreux domaines :

Le tableau psychique peut faire penser à Pulsatilla, avec son humeur changeante, son aversion pour la solitude et son amélioration par la consolation.

Les signes somatiques les plus intéressants sont de plusieurs ordres :

D’abord toute une série de symptômes neurologiques, troubles visuels, paresthésies, troubles de l’équilibre, maladresse motrice, et troubles de la parole, qui en font pour Vermeulen un remède de sclérose en plaques au début.

Il faut ensuite souligner l’importance des troubles ORL, qui le font rapprocher de sticta pulmonaria, kalium bichromicum, arum triphyllum par exemple.

Les signes gynécologiques sont les plus connus : remarquons simplement que l’aggravation nocturne des règles n’est valorisée ni par Allen, ni par Hering, ni par Clarke.

Enfin, il faut insister sur l’importance des signes cutanés, en particulier crevasses, urticaire, prurit aggravé par le grattage et la chaleur.

Un remède par conséquent très intéressant en pratique quotidienne ;

 

Références bibliographiques

1 – TF Allen, The encyclopedia of pure materia medica, Indian books and periodical syndicate, New Delhi, réédition de 1995.

2 – JH Clarke, A dictionary of practical materia medica, Jain Publishers, New Delhi, réédition de 1995.

3 – C Hering, The Guiding symptoms of our materai medica, Indian books and periodicals syndicate, New Delhi, réédition de 1995.

4 – F Vermeulen, Concordant materia medica, Merljin publishers, Haarlem (Hollande).

 

 

Docteur Philippe Colin